Tous les vrais démocrates, c’est à dire les partisans de la démocratie directe, s’interrogent régulièrement sur la pertinence de leur participation, ou pas, aux diverses élections du système oligocratique en place. En mars 2020, auront lieu les élections municipales oligocratiques, c’est à dire une votation destinée à sceller le pouvoir sans partage et pendant 6 ans, d’un petit groupe de personnes, voire le plus souvent d’une seule personne, sur la population de chaque ville et village de France. Ce groupuscule de personnes bénéficiera de pouvoirs très larges, et même quasiment illimités dans le cadre de l’administration de nos communes, si l’on en juge par le flou rédactionnel qui est censé les circonscrire, que ce soit dans le titre XII de la constitution ou dans les 1619 pages du code général des collectivités territoriales.
Cette instance municipale cumule en outre un pouvoir législatif, celui d’édicter des règles coercitives sous forme d’arrêtés, et un pouvoir exécutif, celui de décider et de mettre en œuvre des commandements opérationnels, notamment dans le cadre de l’aménagement et de la maintenance de l’espace public et des réseaux communaux.
Or, le principe fondamental de la démocratie directe étant de confier l’exercice du pouvoir législatif, d’une part, et le contrôle de la fonction exécutive, d’autre part, aux seuls citoyens assemblés, il paraît, au premier abord, difficile de concevoir un programme pour une liste candidate aux municipales qui soit compatible, à la fois avec le principe de la démocratie directe et avec la légalité du système oligocratique en vigueur.
D’un autre côté, il serait dommage de ne pas profiter de la visibilité populaire et de l’effervescence politique créées par cet événement pour tenter de faire progresser les idées de la démocratie directe.
Nous savons que le dispositif de la démocratie directe est basé sur une dense infrastructure d’assemblées citoyennes locales permanentes ouvertes à tous les citoyens, les ACLs, qui détiennent l’exclusivité de la production législative et réglementaire, ainsi que le contrôle des actions opérationnelles du pouvoir exécutif, tant au niveau local que national.
Dans ces conditions, notre stratégie doit s’appuyer sur deux axes, pouvant être développés de façon indépendante ou coordonnée. Ces deux axes sont les suivants :
- Participer à la création d’assemblées citoyennes locales dans chaque ville et village de France avec pour objectif de peser sur les élections
- Constituer des listes citoyennes démocratie directe pour les municipales 2020 ayant pour seul programme l’engagement du conseil municipal à mener sa mission avec le concours permanent de l’assemblée citoyenne locale
Il convient de noter que cette double stratégie est puissante, mais délicate dans sa mise en oeuvre du fait des risques de confusion qu’elle peut entraîner entre le concept de « Liste » et celui d’ « ACL ». En effet, de même qu’une Liste n’est pas une ACL, une ACL n’est pas une Liste. D’un certain point de vue, nous pourrions dire que la Liste est un moyen et que l’ACL est une fin. D’un autre point de vue, la Liste est éphémère alors que l’ACL est pérenne. Par ailleurs si nous considérons la Liste comme devant se transformer en Conseil Municipal, ce dernier, dans l’optique d’une transition vers la démocratie directe, est voué à devenir progressivement une simple courroie de transmission de l’ACL rendue encore nécessaire par le dogme constitutionnel, mais appelée à disparaître bientôt dans le cadre d’une réécriture en profondeur d’une constitution réellement démocratique.
Premier axe : Participer à la création d’assemblées citoyennes locales dans chaque ville et village de France, avec pour objectif de peser sur les élections
Nous appelons tous les « vrais » démocrates, partout où ils résident, à aider à la création d’une Assemblée Citoyenne Locale, sur la base d’une charte commune minimale. Dans le cadre des élections municipales 2020, cette assemblée s’attachera à interpeler toutes les listes candidates pour qu’elles inscrivent dans leur programme l’engagement de prendre leurs décisions avec le concours de l’assemblée citoyenne. La charte commune, qui pourrait naturellement être complétée par des propositions particulières adaptées à la collectivité locale considérée, comporte les six principes suivants :
Charte de l’Assemblée Citoyenne Locale
1. Accessibilité : L’assemblée citoyenne locale est la propriété de tous et elle est ouverte à tous les citoyens. Il n’y a pas d’inscription, pas de cotisation, pas de carte de membre. La régularité de la fréquentation des citoyens n’est pas nécessaire. L’assemblée citoyenne locale est apolitique dans le sens qu’elle n’est pas le lieu d’expression proclamé ou déclaré, d’un clan ou d’une mouvance quelconque.
2. Continuité : L’assemblée citoyenne locale assure des permanences d’ouverture régulières. Les jours et horaires d’ouvertures sont fixes, connus et le plus largement diffusé.
3. Mutabilité : L’assemblée citoyenne locale a vocation à traiter de sujets en prise avec l’actualité, les besoins des citoyens et généralement de toute circonstance nouvelle. L’ordre du jour est établi par les citoyens eux-mêmes.
4. Indépendance : L’assemblée citoyenne locale est totalement indépendante de la représentation. Elle ne peut être organisée, ni présidée par un ou plusieurs élus. Les élus ne peuvent participer aux sessions de l’ACL, excepté en tant que simples auditeurs. L’ACL peut toutefois décider d’auditionner ou de donner la parole à un élu si elle le juge nécessaire. Elle peut également décider d’auditionner un expert sur un sujet donné.
5. Débat argumenté : Les débats de l’assemblée citoyenne locale se déroulent selon le mode contradictoire argumenté, c’est à dire que chaque intervenant est invité à faire l’effort d’argumenter ses affirmations, et éviter les opinions subjectives ou de pur ressenti.
6. Transparence : Les sessions de l’assemblée citoyenne locale se déroulent en toute transparence. Chaque session fait l’objet d’un compte rendu synthétique écrit, mais également d’un enregistrement audio intégral placés en libre consultation en podcast sur le site internet.
Deuxième axe : Constituer des listes citoyennes démocratie directe pour les municipales 2020 ayant pour seul programme l’engagement du conseil municipal à mener sa mission avec le concours permanent de l’assemblée citoyenne locale
Nous appelons tous les « vrais » démocrates, partout où ils résident, à constituer des listes citoyennes pour les élections municipales de 2020 sur la base d’un programme commun minimal de démocratie directe. Ce tronc commun, qui pourrait naturellement être complété par des propositions particulières adaptées à la collectivité locale considérée, comporte les articles suivants :
Généralités
Article 1. Les listes citoyennes « démocratie directe » sont apartisanes dans le sens où elles ne se revendiquent d’aucune étiquette de parti ou mouvement enregistré comme tel et, également, dans le sens où elles ne présentent pas de programme d’action autre que celui issu des initiatives de l’assemblée citoyenne locale. Les candidats figurant sur ces listes ne doivent pas être membre d’un parti ou mouvement politique.
Article 2. Les candidats des listes citoyennes « démocratie directe » déclarent que les conditions d’exercice d’une vraie démocratie impliquent que le conseil municipal de toute commune, ou arrondissement de commune de France se doit d’accomplir la mission qui lui est confiée par le peuple avec le concours permanent d’une Assemblée Citoyenne Locale, répondant à certaines caractéristiques décrites dans la « Charte de l’ACL »
Article 3. Dans le cas où les résultats de l’élection attribueraient la majorité absolue à une liste citoyenne « démocratie directe » au sein d’un conseil municipal donné, les membres de la liste considérée s’engagent impérativement à respecter le « Contrat de gestion démocratique » annexé à ce programme
Article 4. Dans le cas où les résultats de l’élection n’attribueraient pas la majorité absolue à une liste citoyenne « démocratie directe » au sein d’un conseil municipal donné, les membres de la liste DD élus s’engagent à influer par tous les moyens possibles sur le conseil municipal pour que le Contrat de gestion démocratique annexé à ce programme soit appliqué, même partiellement, et, au minimum pour que tous les efforts soient mis en oeuvre pour favoriser la création et le fonctionnement d’une telle assemblée.
Article 5. Dans le cas où les résultats du premier tour de l’élection ne permettraient pas une participation de la liste citoyenne « démocratie directe » au deuxième tour, celle-ci pourrait négocier son soutien à la liste qui s’engagerait sur une application, même partielle, du Contrat de gestion démocratique,
Contrat de gestion démocratique
Compte tenu des fondements suivants :
1. l’assemblée citoyenne locale a pour mission fondamentale d’exercer un contre-pouvoir implicite sur la représentation,
2. cette mission se traduit par l’exercice d’un suivi et d’un contrôle permanent sur les actes des élus, tant sur le plan de l’exécutif, que sur celui du législatif,
3. l’assemblée citoyenne locale assure le rôle emblématique de préfigurer la citoyenneté de demain. Ce rôle nécessite qu’elle engage l’étude critique, en parallèle et en temps réel, des travaux de la représentation : conseils municipaux, conseils régionaux, mais également, assemblée nationale, conseil de l’Europe, G20, ONU, etc.
4. au niveau communal plus particulièrement, les relations de l’assemblée citoyenne locale à destination de la représentation se traduisent par des questionnements, des critiques, des suggestions et des approbations,
Le conseil municipal s’engage impérativement à :
1. Favoriser par tous moyens la création d’une Assemblée Citoyenne Locale, et notamment
- en mettant à sa disposition une salle permanente de réunion
- en diffusant le plus largement la charte de l’ACL auprès de la population locale
- en permettant l’affichage et la diffusion sur les médias
municipaux des informations et notifications relatives à l’ACL - en incitant la population à participer aux sessions de l’ACL, et en rassurant les citoyens sur le fait qu’ils n’ont rien à craindre de la représentation en y participant
2. Répondre dans les meilleurs délais à toutes les questions posées par l’ACL
3.Etudier scrupuleusement et un par un, les arguments sous-tendant les critiques formulées l’ACL et , à défaut de les prendre en compte, d’y apporter des contre-arguments sincères
4. Etudier scrupuleusement les suggestions présentées par l’ACL et y apporter une réponse circonstanciée dans les meilleurs délais
5. Consulter l’ACL en préalable de toute décision d’une certaine importance pour les finances communales
6. Reconnaître à l’ACL une vocation de service public, notamment du fait de la conformité aux lois de Rolland (dites lois du service public) des trois premiers principes (accessibilité, continuité, mutabilité) de sa charte
7. Etudier toute demande de subvention de l’ACL au même titre que toute autre association civile relevant de son périmètre.